La Grèce "moderne"
Qu'est-ce qu'un Grec "moderne"
La Grèce est un Etat "moderne" dans le sens où elle n'existe
en tant qu'Etat que depuis 1821.
Et donc le terme "Grec moderne" fait référence aux Citoyens présents ou
passés de la Grèce post-Ottomane (En d'autres termes : Ce sont les
Grecs de 1821 à nos jours).
La population "Grècque moderne" est majoritairement
Méditerranéenne, de religion Grècque Orthodoxe et de Culture et de
langue Grècque.
Et au niveau ethnique, la
majorité de la population
descend des Mycéniens et des Minoens.
Au 21ème siècle, les
quelques Citoyens Grecs qui ne sont pas d'origine Hellénique sont
principalement issus des communautés Turques, Slaves, Roumaines,
Bulgares, Roms, Levantines, Ukrainiennes, Italiennes et Albanaises.
Dans la Grèce moderne, la Religion Orthodoxe est
omniprésente et fait tellement partie de la culture qu'on n'y fait pas
plus attention que ça : C'est quelque chose de totalement normal, comme
l'est la laïcité dans la France d'aujourd'hui.
Afin d'illustrer à quel point le fait religieux est
important en Grèce, il faut rappeler que jusqu'au début des années
2000,
la Religion était inscrite sur la carte d'identité. Et si cette mention a
été supprimée des cartes, cela a été fait contre la volonté
de la
majorité de la population : Il y avait eu une pétition réunissant plusieurs
millions de signatures (dans un Etat de 11 millions d'habitants) et d'importantes
manifestations réunissant plusieurs centaines de milliers de
manifestants avaient eu lieu contre cette décision
prise par le gouvernement grec de l'époque, sous la
pression de l'Union Européenne, avec le but affiché (et insultant) de
"rendre les Grecs plus Européens" et aussi car l'inscription de la
Religion
sur les papiers d'identité constituait (aux yeux de
l'UE) une discrimination envers les Catholiques, Musulmans et Juifs.
Au niveau religieux, la répartitition des citoyens*
Grecs est la
suivante : 94% de Chrétiens Orthodoxes, 3% de Musulmans, 2% de Païens
Grecs et 1% sont issus d'autres Religions comme les Catholiques ou
encore les Juifs.
A noter que la seule minorité religieuse reconnue par la Grèce est la
communauté Musulmane Sunnite.
*
Les clandestins et les immigrés légaux ne sont pas pris en compte dans
cette répartition religieuse et ethnique, seulement les personnes qui
ont la citoyenneté Grècque.
La différence entre "Grec" et "Grec-Orthodoxe"
Encore aujourd'hui, une bonne partie des Citoyens Grecs
considèrent que la Religion Grècque Orthodoxe est une composante
essentielle de l'identité nationale Grècque.
A titre d'exemple, une
étude réalisée en 2018 par le Pew Research Center a ainsi montré
que 76% des Citoyens Grecs estimaient que leur identité était d'abord
définie par le Christianisme.
La raison est avant tout historique : Si les révolutionnaires Grecs de
1821 étaient majoritairement des Hellènes (c'est-à-dire des descendants
des Anciens Grecs), certains d'entre eux
avaient
d'autres origines (Par exemple, les Arvanites).
Mais malgré cela, les Révolutionnaires de 1821 étaient tous des
Grecs Orthodoxes : Dans le sens où ils étaient tous des fidèles de
l'Eglise Grècque Orthodoxe.
Cette identité religieuse a même été inscrite dans la
Constitution de 1827, élaborée suite à
la guerre d'indépendance de 1821.
L'adage "Est Grec celui qui est
Baptisé" (dans le sens : Est Grec celui qui est un membre de l'Eglise
Grècque
Orthodoxe) était alors communément admis.
La raison est la suivante : à cette époque, les Révolutionnaires
avaient décidé de baser
l'identité Grècque moderne sur la Religion Grècque Orthodoxe, par
opposition aux Ottomans qui étaient Musulmans.
Et même au 21ème siècle, la plupart des Grecs (au sens
ethnique) qui ne sont pas des fidèles de l'Eglise Grècque
Orthodoxe ne possèdent pas la nationalité Grècque.
Ils n'ont donc pas ou peu de liens avec l'Etat Grec actuel.
C'est par exemple le cas des Crétois
Sunnites d'al Hamidiya, près de Tartous, qui ont attérit en Syrie
en 1897 après avoir fuit la Crète, de peur que les Crétois Chrétiens ne
les prennent pour cibles, suite au retrait de l'armée ottomane de
l'île.
Ce choix des Révolutionnaires Grècque de l'époque de baser
l'identité sur la
Religion Grècque Orthodoxe et la perpétuation de cette pratique au
21ème siècle n'est en rien surprenant, car si la Grèce est bien sûr un
pays
européen c'est aussi un pays oriental et balkanique.
Et justement, en Orient et dans les Balkans la détermination de
l'identité d'un
groupe (ex: Coptes, Yézidis,...) à partir de la Religion de ses membres
et/ou le fait que la Religion soit une
composante inséparable de l'identité est considéré comme quelque chose
de normal, aussi bien par les populations que par les dirigeants.
Par exemple, lors des négociations entourant la signature du traité de
Lausanne de 1923, le Président de la Délégation turque, Ismet Pacha,
avait ainsi déclaré que "L'habitude
s'étant établie en Orient de définir la nationalité d'après la religion",
ceci afin de justifier certaines statistiques (Référence : Page
70, Tome 1, Conférence de Lausanne, bibliothèque diplomatique numérique
du ministère Français des affaires étrangères).
L'héritage de la Révolution de 1821 et du traité de Lausanne
de 1923
100 ans après la Révolution Grècque de 1821, le
traité de Lausanne a été signé, en 1923.
Ce traité déterminait (entre autres) les frontières de la Grèce et de
la Turquie, mais il édictait aussi les règles d'un immense échange de
populations basé uniquement sur la Religion :
Les fidèles de l'Eglise Grècque Orthodoxe de différentes origines (y
compris Turco-Mongoles) ont été expulsés en Grèce et les Musulmans de
Grèce (y compris ceux qui étaient des descendants des Grecs Antiques)
ont été expulsés en Turquie.
Lors de cet échange de populations où environ 1,5 millions de
Grecs-Orthodoxes ont été expulsés en Grèce et où environ 800 000
"Turcs" ont été expulsés en Anatolie (l'actuelle Turquie), c'est la
Religion uniquement qui
a déterminé qui était Grec ou Turc.
Les seules exceptions à cet échange de populations gigantesque ont été
les Musulmans de la Thrace Occidentale (Région située à l'est de la
Grèce)
et les Grecs-Orthodoxes de Constantinople (qui ont pour la plupart été
ensuite
chassés par les extrémistes Turcs lors du tristement célèbre Pogrom d'istanbul
de 1955).
Ces événements historiques ont logiquement impacté la manière
dont le
Peuple Grec perçoit son identité et explique aussi en partie
"l'intolérance" religieuse des Grecs.
La culture grècque moderne et la laïcité
La laïcité est incompatible
avec la culture et l'identité grècque moderne et adopter ce système en
Grèce (idée défendue par certains bureaucrates Nord Européens)
reviendrait en quelque sorte à trahir la
Révolution de 1821.
Le fait est que la Grèce moderne a été créée par les fidèles
de l'Eglise Grècque Orthodoxe de l'époque, car ils ne souhaitaient plus
vivre ensemble
avec les Musulmans et les autres communautés religieuses de l'Empire
Ottoman.
Les Révolutionnaires de l'époque voulaient un Etat pour leur Eglise
(Eglise dans le sens: communauté religieuse).
C'est la raison même de l'existence de la Grèce moderne, pourquoi elle
existe.
La laïcité, dans le contexte grec, cela reviendrait à remettre en
question l'existence de la population grècque actuelle, puisque son
identité s'est
construite et est basée sur la Religion Grècque Orthodoxe.
De plus, la séparation de l'Eglise et de l'Etat
pourrait conduire à une situation où l'Islam deviendrait la seule
Religion officielle de la Grèce, car il est quasiment impossible en l'état actuel de séparer
l'Islam de l'Etat Grec et même d'enlever la Charia de la
Constitution Grècque.
Pour pouvoir séparer l'Islam de l'Etat, il faudrait auparavant modifier le traité
de
Lausanne et notamment sa section 2 : "Protection des minorités" et cela nécessiterait l'accord de plusieurs pays dont la
Turquie, qui conteste de plus en plus ouvertement la souveraineté de la
Grèce sur plusieurs îles grècques de la Méditerranée Orientale.
Autant dire tout de suite que tenter de modifier ce texte reviendrait à
ouvrir la boite de Pandore, car c'est aussi dans ce fameux traité de
Lausanne (articles 12
et 15)
que la Turquie a accepté en 1923 de céder certaines de ces îles à la
Grèce et d'autres à l'Italie (qui les a plus tard cédées à Athènes).
Et pour ne rien arranger, il y aurait d'importants gisements
de gaz sous les eaux
territoriales qui se trouvent autour de certaines îles.
Comment obtient-on la Nationalité Grècque
Traditionnellement, la Grèce applique le droit du sang partiel
et le Patriarcat
comme dans beaucoup de pays Méditerranéens : Il faut donc généralement
avoir un père
Grec pour avoir la Nationalité Héllènique. Il est ainsi assez compliqué
pour une femme Grècque de faire reconnaître ses enfants comme Grecs
s'ils ont un père étranger.
D'ailleurs, même les enfants d'un père qui est citoyen Grec peuvent
avoir des
difficultés à obtenir la Nationalité Grècque s'ils sont nés à
l'étranger (mais dans ce cas, il y a souvent moyen de s'arranger).
Aussi, les derniers gouvernements en place ont permis à des
ressortissants
étrangers très riches de devenir résident en Grèce et d'obtenir
éventuellement la nationalité grècque à condition
qu'ils fassent des investissements importants en Grèce : C'est le
méchanisme des visas
dorés.
Il
y a aussi l'octroie de la nationalité grècque pour service rendu et
depuis peu, les enfants de ressortissants étrangers vivant légalement
en Grèce peuvent l'obtenir (mais il
faut passer un test).
Ces dernières années, la législation a beaucoup évolué.
Les pressions étrangères (et notamment de celles de l'UE) y sont pour
beaucoup.
Le drapeau de la Grèce
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Le drapeau Grec est bleu et on trouve dessus une
Croix qui représente l'Eglise Orthodoxe (qui a joué un rôle déterminant
lors de la guerre de libération de 1821-1825 contre les Ottomans) et 9
bandes (5 bandes bleues et 4 bandes blanches). Ces bandes correspondent
au nombre de syllabes de la phrase Elefteria i Thanatos (la liberté ou
la mort) qui était le cri de ralliemment des résistants Grecs lors de
la bataille finale contre les colonisateurs Ottomans.
La couleur bleue du drapeau correspond à la
couleur de la mer et la couleur blanche aux vagues (La mer est
extrêmement importante pour le pays, d'ailleurs la Grèce a la première
flotte commerciale au monde).
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Le système judiciaire grec
Tout comme son système politique, le système judiciaire grec
est assez différent du
système judiciaire français et peut parfois donner lieu à des peines
plutôt
impressionnantes :
Quelques informations sur la justice et le
système pénal en Grèce.
Articles et livres sur la Grèce Moderne
Le
conflit lié à l'évolution de la carte d'identité en Grèce : Etude de
cas (en anglais) portant sur le lien entre la Religion et l'identité
Nationale face aux défis de l'intégration européenne et du pluralisme.
Religion
et politique en Grèce, article en français de l'Observatoire
Pharos.
Article sur la protection
constitutionnel des minorités religieuses en Grèce (en anglais).
"Islam et Nationalisme dans
la Grèce Moderne, 1821-1840" (en anglais).
Ce livre, édité par Oxford University Press, évoque notamment le fait
que la Religion reste un élément essentiel de l'identité grècque et que
le nationalisme religieux et les Institutions publiques grècques ont
joué un rôle important dans le développement d'une identité ethno
religieuse en Grèce.
Un bref résumé en français peut être trouvé sur cet autre site :

Science et vie : "Près
des côtes, chaque tranche de mer et ses ressources ont leurs légitimes
propriétaires".
Vie Publique : "Le
gaz : Nouvel enjeu géopolitique en Méditerranée Orientale".
Le traité
de Lausanne du 24 juillet 1923.
Les Echos (2020) : "Zone
riche en hydrocarbures et théâtre de querelles territoriales, la
Méditerranée orientale est au coeur de vives tensions entre la Grèce et
la Turquie. Une crise dans laquelle la France est impliquée". |